Les marques, des hyperêtres pour se passer de chefs
et s’affranchir des pesanteurs internes…
Je suis fier de voir mon article dans l’excellente revue de marketing Influencia, et avec toute ma sympathie et mon respect à l’égard de son équipe, j’en rappelle le titre original (ci-dessus) qui n’est pas celui que vous verrez dans la publication (les marques peuvent-elles être des alibis d’entreprise ?). Ce dernier fonctionne de façon indirecte, en se référant à l’étymologie du mot alibi, qui en latin signifie « ailleurs ». les marques sont-elles « ailleurs » que dans les entreprises ? Jusqu’où vont-elles s’écarter de leur sol ? En outre, sur mon site à moi, je peux introduire plus facilement un néologisme – des hyperêtres – encore peu usité, justement dans le but de l’enrichir en contenu et d’en suggérer l’emploi.
En complément de l’article (que je vous invite à lire avant ou après), voici quelques réflexions « dans l’escalier »…
Le point central – honte à moi s’il ne saute pas à la figure – est bien que les marques s’élèvent spontanément, telles des montgolfières, au-dessus des pesanteurs humaines, structurelles et administratives de l’entreprise. Elles s’élèvent dans le virtuel pour s’affranchir aussi bien de la souffrance des collaborateurs que de la rigidité mécaniste des procédures. Elles s’envolent pour s’amuser à nouveau, pour croire à des causes, pour ressusciter un rêve qui se meurt dans le local à photocopieuse…
On peut y voir un effet de génération, un réflexe métier des marketeurs, un appétit d’innovation qui frise l’affolement, et surtout un décalage – voire un gouffre – entre ce qui bouge dans la société et ce qui ne bouge pas en interne dans les entreprises.
Les marques, même anciennes, même solides et conservatrices, sont une matière socio-culturelle avec laquelle l’intellect peut jouer. Le talent peut les transfigurer bien plus facilement que les habitudes managériales. C’est le tissu social mondial en complète mutation qui les arrache à leur réalité et leur donne ce statut d’hyperêtres, capable parfois de prendre en charge des causes qui sont hors de portée pour chacun de nous. C’est d’ailleurs pourquoi le statut de Marque dépasse de loin le champ strictement commercial, pour toucher aussi l’humanitaire, l’information, la vie des territoires, etc.
Les marques s’élèvent donc tout simplement dans l’infosphère… parce qu’elles le peuvent !
Un conseil gratuit ?
Il y a quelques années, on parlait de « manager par les valeurs de la marque »… programme révélateur d’un temps où l’on croyait tout calculer, tout expliciter, tout prescrire. Mais si les moyens « industriels » pour le faire étaient d’un autre âge, c’est aujourd’hui une évidence pour les startups : la marque, c’est l’âme de l’entreprise. Alors, est-ce qu’il est bon qu’elle quitte le corps ? Comment retrouver cette unité organique (et surtout, ne parlons plus de marque employeur, ce faux-nez à l’usage des grandes écoles) ? C’est possible dans les collectifs du futur : je le vis chaque jour à Mutinerie, mon espace de coworking préféré. Les habitants de Mutinerie s’appellent eux-mêmes « les mutins ». Il s’identifient à la marque au point d’en endosser l’identité avec gourmandise, pire que chez Procter et Gamble, alors que ce n’est même pas leur entreprise. C’est leur lieu de vie professionnel. Une marque peut sans doute fédérer les énergies, dans une industrie plus traditionnelle, au point de se passer de hiérarchie et d’organisation, mais pas d’un espace de vie où l’on est heureux et où l’on s’amuse !